David en balade

David  en  balade

Océan Indien-Atlantique Sud

EN TRANSIT : L'OCEAN INDIEN ET L'ATLANTIQUE SUD

 

Du 17 février au 06 mars 2008.

L'idée de départ était "tout simplement" de traverser le Pacifique via Panama en cargo depuis l'Asie pour débarquer quelque part sur la côte est de l'Amérique du Sud. Mais les plans étant faits pour être modifiés, et de préférence à la dernière minute, ce trajet n'a pas été possible faute de liaison directe. Du coup, je suis parti dans l'autre sens : Singapour, l'Océan Indien, le Cap de Bonne Espérance puis l'Atlantique Sud, pour débarquer au Brésil. Plus précisément à Santos, port de Sao Paulo. Soit 16.700 km selon le GPS. Le tout en 18 jours de mer pas toujours sereine sur un gros porte-conteneurs. Les amateurs d'air iodé, d'art métallurgique et d'ambiance garage types soudures et cambouis apprécieront les photos ci-dessous.  Les autres non, désolé !

 

 

Port de Keppel à Singapour

Avant l'embarquement, j'ai sournoisement utilisé un badge laisser-passer que l'on m'a attribué très temporairement pour m'incruster deux heures dans l'enceinte sécurisée du principal terminal à conteneurs de Singapour, et prendre quelques clichés de rafiots et de boites.  Mon nouvel hôtel flottant est visible à l'arrière plan à gauche, en bleu et blanc. On notera la taille minuscule, en comparaison, du petit pétrolier arrimé sur babord (= sa gauche) et le ravitaillant en fioul et lubrifiants. Pour mieux comprendre les proportions, il faut savoir que les flèches horizontales des grues jaunes sur le quai sont à 50 mètres de haut.

 

 

Déchargement du M.O.L. Wish dans le port de Keppel

Le Wish mesure 245 mètres de long (15 de moins que les défunts jumeaux Foch-Clémenceau) et 32 de large. Il peut théoriquement emporter 1.500 grands conteneurs de 12 mètres de long comme ceux ci-dessus. Tu parles d'un rafiot !  Et à peine amarré que déjà trois grues de 40 tonnes commencent le déchargement des conteneurs, avant d'en ajouter de nouveaux.  Mécanisation aidant, les escales ne durent en général que quatre ou cinq heures, au grand dam des marins qui n'ont plus le temps d'aller s'encanailler en nocturne en ville, comme au bon vieux temps des cargos vraquiers. Bon cette fois-ci, ils ont eu plus de chance : une panne d'un préchauffeur d'huile du moteur a immobilisé le bateau une semaine au port. J'en ai profité aussi, car du coup, la compagnie gestionnaire du bateau avec laquelle je voyage à bord m'a logé tout ce temps dans un hôtel cinq étoiles de Singapour avec buffet à volonté et tout. Ou comment faire du gras en regardant CNN sur un King Bed...

 

 

Déchargement du M.O.L Wish

Les boites sont déposées sur des camions, qui partent immédiatement les ranger sur l'aire de transit du port, voire les livrer au destinataire. Sur le quai, les camions vont et viennent, et les portiques sont mobiles même latéralement (sur rails)... Attention à ne pas se faire écrabouiller !

 

 

Déchargement du Wish

Vue latérale au bord du quai. La petite tache blanche, devant, c'est une camionnette. Juste pour donner l'échelle.

 

 

Poupe du Wish

Le bébé, vu de Q. Le pont d'amarrage arrière se trouve à quatre mètres au dessus de l'eau ; le pont principal deux mètres plus haut. Oui, c'est grand. M.O.L. est le nom de l'armateur japonais : Mitsui-Osaka-machintruc-Lines.

 

M.O.L. Wish au départ

Cette photo n'est évidemment pas de moi, puisque même avec beaucoup de bonne volonté je ne peux pas être à la fois dessus et à côté ! La barcasse en premier plan, c'est la vedette du pilote du port.

 

 

Croisement dans le détroit de Malaka

Même ayant quitté Singapour, on ne se sent pas vraiment seul dans le détroit : une vraie autoroute à rafiot. La nuit, au risque de collision s'ajoute celui des pirates en vedettes rapides. Nous voila bien !

 

 

Maintenance à bord

Le métal n'aime pas l'air salin. L'objectif est donc de lutter en permanence contre la corrosion : on décapouille, on grattouille, on barbouille une couche d'anti-rouille et on repeintouille. Partout, tout le temps. Quand on a terminé d'un côté, on recommence de l'autre. Mais malgré les efforts déployés, c'est quand même la rouille qui gagne à la fin. C'est vraiment trop inzuste !

 

 

Chief Mate on the bridge

Le capitaine en second, de quart sur la passerelle en fin d'après-midi pluvieux ("F... weather !"). Visibilité réduite mais pas de souci : une fois en pleine mer hors des grandes routes commerciales, on est vraiment seul au monde.

 

 

Salle des Cartes

Premier Lieutenant en train de faire le point et de reporter la position GPS actuelle sur la carte (celle des environs de l'Afrique du Sud, en l'occurrence). 21 marins sont à bord : cinq officiers européens, principalement allemands ; le reste de l'équipage est philippin.

 

 

Rien au radar

Rien de gros et métallique dans un rayon de 12 miles. Seuls les nuages bas sont réfléchis par le radar.

 

 

Fin d'exercice incendie

Une fois par mois, on joue à se faire peur : Un pseudo incendie est signalé dans un coin sensible du bateau, et l'équipage a quelques instants pour se rendre sur les lieux avec tenues et équipements adéquats. Mieux vaut ne pas prendre ce risque d'incendie à la légère, car certains conteneurs renferment des produits chimiques particulièrement dangereux.

 

 

Exercice d'évacuation

Tant qu'on y est, après le faux incendie, on fait mine de se barrer vite fait avec le canot de sauvetage. A l'appel de la sirène, la quasi totalité de l'équipage se retrouve donc sur le pont d'évacuation en tenue de sortie.

 

 

Exercice d'évacuation

Fini le syndrome Titanic : ici, 21 gus se tassent dans un canot de 30 places avec rations sèches, eau potable et Dramamine pour 10 jours. Y en a pour tout le monde ! Là s'arrête l'exercice. En cas de vraie évacuation, ensuite, on verrouille la porte, on tire une poignée et, si l'on n'a pas bêtement oublié d'enlever au préalable une goupille de sécurité sur le pont, un treuil automatique descend le canot à la mer en moins de temps qu'il n'en faut pour copier-coller les accents sur ces lignes. On n'a plus alors qu'à faire le bouchon sur les flots agités pendant que la balise satellite automatique lance le S.O.S.

 

 

Coucher de soleil sur l'Océan Indien

Bon, d'accord, pour un tour du monde vers l'est, je devrais avoir le coucher dans mon dos. Passons sur les détails qui agacent ! C'est bien joli, tous ces nuages, mais cela n'annonce rien de bon pour le lendemain.

 

 

Orage sur l'Océan Indien

Celui-là a été plus rapide que les prévisions météo. Déjà les premières gouttes de pluies tombent, y compris sur mon objectif. Plus le temps de se dérouter. Tant pis, ça va remuer sur le rafiot, dans un grand concert d'affreux grincements métalliques de centaines de conteneurs qui ripent.

 

 

Roulis par gros temps

Contrairement au tangage, où le nez du bateau pique dans les creux et se redresse au dessus des vagues entrainant un mouvement longitudinal, le roulis est un mouvement latéral : on penche un coup à droite...

 

 

Roulis par gros temps

...puis un coup à gauche. Ce soir là, avec des creux de mer de 5 mètres, l'inclinaison était de 7 degrés, avec un cycle tout-d'un-côté-puis-tout-de-l'autre de seulement 15 secondes. J'ai trouvé une nouvelle définition pour M.O.L : Mauvaise Oscillation Latérale ! Au début, le roulis, ça amuse le gogo, notamment de voir marcher les marins agrippés aux rambardes et inclinés dans les couloirs, façon Pise. Mais ça fatigue vite, surtout au mess quand on se prend le potage du soir sur les genoux, ou au lit quand la tête glisse systématiquement à côté du coussin ! De quoi rêver du Lac Léman sous un anti-cyclone estival.

 

 

Ciel enflammé sur l'Océan Indien

Ca fait rien, ça donne quand même de chouettes couleurs le mauvais temps ! Et sur 360 degrés, car aucun arbre ni building n'arrête la vue. La terre la plus proche est au moins à 300 km.

 

 

Niveau un (sur trois) de la salle des machines

C'est ce que l'on appelle un Moteur. Avec un grand M. Le constructeur du bazar (et de tout le navire d'ailleurs, en 1995) est le coréen Daewoo. Mais c'est surement un autre modèle qu'il utilise pour ses voitures ! L'ensemble du moteur, sur trois étages, mesure environ 12 mètres de haut. Il consomme 5 tonnes de carburant à l'heure à pleine vitesse. Parlez moi d'économies d'énergie !

 

 

Niveau deux de la salle des machines

Le mécano que j'accompagne a bien tenté de m'expliquer plein de trucs techniques, mais entre son Anglais approximatif, mon vocabulaire limité et le vacarme ambiant (on ne s'entend plus HURLER), je n'ai pas retenu grand chose. Si ce n'est l'impression de démesure.

 

 

Réparation dans la salle des machines

Pas marrant tous les jours, la vie de soutier ! Ici, en train de démonter une pompe de transbordement de carburant défectueuse. En plus de la forte chaleur et du bruit, il faut se battre contre la rouille qui bloque le moindre écrou et contre le poids des énormes pièces mécaniques.

 

 

Arbre de transmission

Ca pourrait être une torpille monstrueuse dans un sous-marin géant. Ben non, c'est juste la ligne d'arbres (de 60 centimètres de diamètre !) entre le moteur dans mon dos et l'hélice derrière la cloison du fond.

 

 

Salle de commande des machines

On peut enlever le casque anti-bruit car la pièce est relativement insonorisée. Ca vibre et ça clignote de partout. On se croirait à la centrale de Tchernobyl, juste avant le bug !

 

 

Tintin dans la cabine du Ramona

Mon confortable salon, d'où j'ai vaguement essayer d'apprendre l'Espagnol pendant ces presque trois semaines, à partir de bouquins... en Anglais !  Dans la pièce derrière : un grand lit où l'on peut rouler à l'aise ; et une mini salle de bain où l'on se cogne gaiement.

 

 

Bibi prêt à être évacué

Bon, j'ai bien retenu la leçon : Pas de panique, je me bouche le nez et je saute à la mer en hurlant !

 

 

Le Chef en action

Deux menus à chaque repas : un occidentalisé pour les officiers ; un asiatique pour l'équipage philippin. Pour la petite histoire, le Chef Jason (c'est son nom) est titulaire d'un diplôme de droit des affaires à Manille, mais finalement, ce poste de cuistot embarqué sur un bateau à pavillon européen payait mieux.

 

 

Surprise au matin

Lors d'une nuit particulièrement agitée vers le Cap de Bonne Espérance, des vents violents de 120 km/h et une mer démontée avec des creux de 7 mètres ont été rencontrés. Deux lames ont réussi à passer par dessus le toit-déflecteur à l'avant du bateau, et ont défoncé trois conteneurs de la première rangée. Un sacré punch !

 

 

Visite (presque) en haut du mat

20 noeuds de vitesse du bateau, plus autant de vent de face, ça donne un cumul de 70 km/h dans la tronche. Forcément, ça décoiffe ! Le Commandant m'avait proposé la visite intégrale du bateau, de tout en bas à tout en haut. C'est fait et c'est passionnant, mais pas de tout repos.

 

 

Inspection des conteneurs frigorifiques

Deux fois par jours, on contrôle la bonne marche et la température des frigos. Il y a tout ce qu'il faut à bord pour réparer illico. S'agit pas que les langoustes asiatiques décongèlent en route !

 

 

Elément décoratif du mess de l'équipage

En v'la une autre, de langouste ! Inutile de se demander à quoi pensent les marins en mer...  Comme ce blog, pardon LE blog, est tout public, et ne désirant nullement choquer (ou éduquer) les mineurs visitant ce site, j'ai choisi la pin-up la moins dévêtue. Je ne parlerai même pas de la vidéothèque crapuleuse des philippins et des fonds d'écrans d'ordinateurs très Hot !

 

 

Déchargement à Santos (Brésil)

Et re-belote à l'arrivée : vas-y que j'te bouge les boites à cent à l'heure. Après 18 jours de mer infinie, ça fait quand même bizarre, du bord, de voir soudain tout à côté plein d'agitation : un nouveau port, une nouvelle ville, un nouveau pays, un nouveau continent... Il est temps de boucler le sac-à-dos et de débarquer.

 

 

 

 

 



07/03/2008
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